La petite lumière jaune. Terrifiante infaillibilité - chez le coiffeur - des lois de l'optique.
Chez le coiffeur, pour me faire ratiboiser la tignasse que, par flemmardise, j'ai laissé croître depuis trois mois.
Tête immobile, parfois légèrement inclinée par les doigts experts du professionnel aux ciseaux parfaitement affûtés, je n'ai d'autre choix que de regarder droit devant moi. Le miroir. Et en dessous le lavabo. Qui s'entoure d'une collerette de faïence marron sur laquelle, je remarque rapidement que court une improbable petite lumière jaune. Qui clignote. Sa présence miraculeuse ne peut être le fruit du hasard - car je la vois cette lumière, je la vois de mes propres yeux, et rien ne peut venir démentir l'évidence de sa présence: il y a, sur le lavabo du coiffeur, une petite lumière jaune.
Je cherche, je cherche une cause naturelle, l'explication, celle qui fait s'écrier: ' Bon sang mais c'est bien sûr! Tout à fait logique en somme!'
Je cherche, je cherche de tout mon coeur en espérant qu'elle ne vienne pas, cette rationnelle explication.
Je cherche, soudain furieusement affamé de ce qui demeure inexpliqué.
Je cherche avide de croire à l'impossible. Avide de surnaturel. Avide de ce qui n'a pas de sens et qui, paradoxalement en donne un plus grand.
Je cherche jusqu'à ce que, tournant légèrement mon cou, je ne découvre un camion poubelle s'affairant en silence dans la rue: la lumière jaune est le simple reflet, près de moi, de son gyrophare virevoltant. Déception.
Un court moment, tandis que le coiffeur me passe un petit coup de rasoir sur les pattes - selon le terme exact - je songe à l'hégémonique puissance des lois de Descartes.
Nulle part - vous m'entendez bien 'nulle part'- nulle part où il est censé se refléter, le gyrophare n'oublie d'accomplir son optique besogne.
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