Proust et Frankenstein
Le
soir du dimanche 10 novembre 1912, Marcel Proust, qui va de déconvenue
en déconvenue avec les éditeurs, écrit à Mme Straus :
'J'ai
tellement l'impression qu'une œuvre est quelque chose qui sorti de
nous-même, vaut cependant mieux que nous-même, que je trouve tout
naturel de me démener pour elle, comme un père pour son enfant.'
Marcel
Proust n'a pas eu d'enfant, son grand livre fit toute sa progéniture.
Je
trouve touchante cette modestie qu'on sent chez lui, toujours, devant
son œuvre.
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Marcel Proust au bord du Grand Canal, Venise printems 1900 |
Les hommes deviennent peu de choses devant leur œuvre
dès lors qu'ils réussissent à extirper de leurs entrailles le
meilleur de ce qu'ils ont senti - c'est paradoxal, mais le plus grand
créateur, une fois son but atteint, se voit immédiatement condamné
à rentrer dans l'ombre, à s'effacer devant la créature qui vient
de sortir de lui: s'il a bien travaillé, tout de suite elle prend toute la place.
Marcel
Proust a tout fait pour que sa créature soit plus grande que lui, il
y réussit si bien que son œuvre immédiatement l'efface, le laisse
en plan, lui, l'homme, et nous on reste un peu triste de le voir ainsi
relégué aux oubliettes par la comète qu'il a lancée.
Ce que je dis là
Proust en avait pleinement conscience, c'est tout le sens finalement
de son 'Contre Sainte-Beuve'.
Je disais donc que Proust y réussit si bien que... bien sûr on a envie de tout savoir de lui.
Heureusement, Jean-Yves Tadié est passé par là...
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Tome II de la biographie de Marcel Proust par Jean-Yves Tadié |
... et je ne saurai trop vous recommander de lire, si ce n'est déjà fait, la biographie définitive qu'il a consacrée à Marcel Proust.
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