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Affichage des articles du juin, 2019

Bob Morane et Goldorak aux yeux de ma vieille idiotie

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En marchant tout à l'heure dans la rue, me vient aux lèvres, sans prévenir, ce petit bout de 'l'Aventurier': '… Avec l'ami Bill Balantine Sauvé de justesse des crocodiles' Dans toutes ces histoires de super-héros, voilà bien ce qui au fond n'est pas tolérable: ce 'de justesse'. Les super-héros sont systématiquement sauvés de justesse. A force de tant défier les lois de la probabilité, cela en devient vraiment déprimant, comme une insulte persistante à l'intelligence. Je ne peux éprouver ni tendresse véritable ni sympathie pour ce genre de robots toujours artificiellement sauvés de justesse. Des robots? Pas des hommes en tout cas. Du coup – du coup, mais allez vraiment savoir pourquoi – je me rappelle une phrase de C. qui m'avait, à l'époque où il l'avait prononcée, extraordinairement troublé. Nous avions vingt ans, et, la soirée s'imprégnant d'un soupçon de nostalgie, nous en étions arrivés à ce point où

L'ignorance est un moteur puissant

Il ne faut pas connaître trop tôt les grands chefs d'oeuvre –  moi Doctus Monkey, j'en suis intimement persuadé. Jusqu'à l'âge de 20 ans, je n'avais rien lu ou presque. Cela me semble a posteriori une chance inouïe. Pour débuter, pour traverser sans trop d'encombre le temps nécessaire aux premiers pas, il faut être suffisamment naïf, suffisamment aveugle. Si j'avais, à dix-sept ans déjà, lu et apprécié 'Les frères Karamazov', 'Nostromo', 'Sartoris' et 'La Conscience de Zeno',  comment mes balbutiements littéraires de l'époque auraient pu à mes propres yeux tenir un tant soit peu la route? Or il le fallait. Il le fallait car cette route est longue. Et si dès le premier jour, tu sais exactement tout ce qui te reste à faire, c'en est fini, fini de tes chances: tu te retrouves les jambes coupées jusqu'au haut des hanches. Je me souviens d'un camarade à Normale Sup' dont j'enviais la culture ébou

Au commencement du livre. Abstraction du processus d'écrire – le grand arbre de tous les livres.

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Plaçons-nous au premier jour du livre d'Elmo. Voilà la situation initiale: je veux écrire un livre, comment m'y prendre? Moi Doctus Monkey, je veux aborder le problème à ma façon. Qui consiste à faire jouer les forces de l'abstraction mathématique. Je commence donc par réfléchir aux livres et aux écrivains, à la manière dont je réfléchis en géométrie aux triangles, ou, en algèbre, aux groupes de Lie. C'est à dire que je veux m'abstraire, prendre de la hauteur, voler au dessus de chaque livre, de chaque écrivain. Pour voir ce qu'ils sont réellement. En somme mettre au jour la 'structure' de livre et celle d'écrivain, comme un mathématicien met à jour la structure de groupes ou celle d'anneau commutatif. Ce qui représente réellement une tentative de lévitation. Prenons l'exemple du triangle: à partir de l'observation de quelques spécimens, j'essaie de me hausser au dessus de chacun d'eux, l'effacement des particularités

Roger Federer vous fait croire en l'éternité.

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Je pensais en avoir fini avec ma (courte) série d'articles consacrés au tennis mais...  Je ne peux résister à la tentation d'en ajouter un nouveau car, contre toute attente, à presque 38 ans et sur sa surface la plus faible, RF s'est qualifié pour les demi-finales du tournoi de Roland Garros au terme d'un magnifique combat contre Stan Wawrinka. Comme me l'écrit mon ami Christophe, il va nous faire croire que le rêve ultime est accessible: gagner RG en jouant l'attaque à outrance - car cette année, contrairement à 2009, il tergiverse très peu du fond du court... Avant cela, bien sûr il faudra vaincre Nadal: cela paraît très improbable... J'ai bien peur de deviner ce qui va se passer vendredi: Nadal pilonne le revers de RF à grands coups de lifts hyper bombés en attendant la faute. Zéro créativité, efficacité maximale. J'espère me tromper: s'il parvenait enfin à battre RN dans son jardin, cela constituerait sans nul doute un point culminant d

Federer de préférence à Nadal: un choix politique (épisode 2)

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Dire ce qui se passe exactement lorsque Nadal supplante Federer. Triomphe du Romain sur l'Héllène. Du Steamer sur le Clipper. De Rotschild sur Saint-Simon. Triomphe de la force brutale, du pragmatisme. De la fin qui justifie les moyens. De la standardisation, du stéréotype. Triomphe de la machine à vapeur sur le pur sang. Du marteau-piqueur sur la plume qui caresse. Du gestionnaire sur l'entrepreneur. Du destructeur sur le créateur. C'est Yamaha qui prend le dessus sur Stadivarius. L'usine sur l'atelier. La production de masse sur l'artisanat. Triomphe du body-builder sur le sport's man. Triomphe d'un certain système de valeurs. Qui n'est pas le mien. Rafaël Nadal, le style, la grâce, l'élégance. C'est le lift qui fait la ligne de démarcation. Nadal l'a franchie. Il lifte, furieusement, frénétiquement. Dix fois, cent fois. D'une manière absurde et outrancière. On le sent prêt, s'il le faut, à mourir